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Dimanche 10 septembre, nous nous réveillons à 6 heures, car aujourd’hui, nous partons voir la DMZ, la zone démilitarisée qui sépare la Corée du Sud de la Corée du Nord. Nous avons rendez-vous à Camp Kim, où se trouve l’agence Koridoor qui organise le tour (nous avons payé 40 000 won par personne la demi-journée, possibilité de réserver directement en ligne). C’est l’agence qui s’occupe d’organiser des tours et d’apporter un soutien moral aux militaires Américains qui sont affectés en Corée.

Nous sommes accueillis par une employée de l’agence, qui nous fait signer un formulaire de décharge de responsabilité en cas de perte d’objets, mais aussi de blessure ou pire… Bon ça fait un peu peur mais on se dit que c’est normal, ce n’est pas un endroit anodin non plus. Nous avons réservé un tour « demi-journée » qui ne comprend pas la visite à la JSA (Joint Security Area), qui est le seul point de passage entre les deux pays, et donc le seul endroit où l’on peut concrètement voir des soldats du nord. Cette visite est probablement la plus intéressante et impressionnante, mais elle est (logiquement) très chère et nous avons donc choisi de faire l’impasse dessus. D’autant plus qu’avec les circonstances assez tendues, des points de visite sont inaccessibles aux visiteurs.

Nous sommes rejoints par un Brésilien et un Argentin, et découvrons avec plaisir que nous ne serons que 4 pour cette visite, presque un tour privé en soit ! Notre guide nous accompagne jusqu’au bus et nous partons à 8h pétantes.

Il y a environ une heure de trajet pour arriver au premier endroit de la visite. Notre guide (qui est très drôle et assez maladroite, son micro n’arrête pas de faire des larsens, elle fait tomber ses papiers, tombe à moitié dans le bus…!),  nous réexplique les circonstances de la séparation entre les deux Corées, que nous avions déjà vues au musée de la guerre : la colonisation japonaise, la fin de la deuxième guerre mondiale et la victoire des Américains/Soviétiques, le partage du pays en deux par les Américains et les Soviétiques, et le début des problèmes. À la fin de la guerre de Corée en 1953, un armistice a été signé (sans vainqueurs) et la DMZ a été mise en place : il s’agit d’un espace de 4 kilomètre de large (2 kilomètres dans chaque pays), une sorte de no-man’s land qui entoure la frontière. Ce serait considéré comme un acte de guerre que d’entrer dans la zone. On nous expliquera plus tard que le nom « démilitarisé » ne convient pas, car la zone est pleine de mines et probablement l’une des plus militarisée au monde.

Nous longeons la rivière Han pendant un long moment jusqu’à son estuaire. Au fur et à mesure que nous avançons, la brume s’épaissit, on a presque l’impression que c’est fait exprès… Le long de la rivière, on sent déjà une certaine tension militaire : les bords de la rivière sont entourés de barrières et de barbelés pour éviter les espions qui pourraient venir à la nage, et on compte déjà quelques miradors. Quand nous arrivons à l’estuaire, nous prenons vers l’est pour longer désormais la rivière Imjin. C’est maintenant la Corée du Nord qui se trouve de l’autre côté de la rivière. Les barrières et les barbelés se font alors plus grands, et les miradors plus fréquents. Cela fait quelques frissons de se dire que nous sommes si près de ce pays qui fascine et qui fait peur à la fois. On a en fait du mal à se rendre compte…

Nous roulons encore une dizaine de minutes et arrivons à notre premier stop, Imjingak, qui est la zone la plus proche de la frontière encore accessible aux civils. L’espace a été aménagé comme une sorte de mémorial. On arrive par un grand parking où juste à côté duquel se trouve un parc d’attraction. Assez glauque et pas vraiment à sa place !

Notre guide nous emmène voir un premier autel, puis un monument qui raconte comment la Corée du Sud, via sa chaîne de télé KBZ a retransmis pendant 138 jours une émission pour que les gens séparés par la guerre puissent se retrouver. Les personnes ayant perdu un membre de leur famille venait décrire la personne à la télévision, en espérant que quelqu’un la reconnaisse. Apparemment, plus de 10 000 personnes ont pu être réunies grâce à ce moyen.

On peut également voir dans ce parc le pont de la liberté, qui traverse la rivière Imjin et réunissait auparavant les deux Corées. C’est en traversant ce pont que sont rentrés de nombreux Sud-Coréens chez eux avant que les pays ne soient séparés pour de bon. À côté se trouve une ancienne locomotive qui s’est retrouvée au milieu de l’actuelle DMZ lors du conflit et qui a été récupérée, criblée de balles, il y a quelques années.

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Dans ce mémorial, les drapeaux, les rubans et les messages de personnes souhaitant la réunification des deux pays et aussi parfois retrouver leurs familles est probablement le plus émouvant et le plus triste. La Guerre Froide n’est pas terminée en Corée, et les populations en payent toujours le prix fort.

Nous nous baladons un peu tous seuls et observons les nombreuses statues, souvent en l’honneur de l’armée américaine qui s’est battue pendant la Guerre de Corée.

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Nous repartons dans notre minibus alors que de nombreux (gros) bus de touristes sont en train d’arriver. Apparemment, notre agence fait en sorte d’arriver avant le flux, plutôt pas mal ! Nous nous dirigeons maintenant vers le « 3ème tunnel », qui se trouve dans la zone militaire interdite aux civils (sauf dans le cadre d’un tour évidemment). Notre guide nous emmène d’abord dans le petit musée, pour que nous puissions aller voir un film qui raconte l’histoire du tunnel. Après le résumé habituel sur les causes de la guerre et des images glaçantes de celle-ci (mais avec des explosions, une voix off et de la musique de blockbusters américains…), il se penche sur la construction et la découverte de ces tunnels. Vingt ans après l’armistice, les Coréens du sud ont découvert plusieurs tunnels qui passaient au-delà de la frontière. Le premier a été découvert en 1974 (il faisait 1km), le deuxième un an plus tard en 1975, le troisième qui nous intéresse en 1978 et le dernier en 1990. Les Sud-Coréens ne sont pas dupes et supposent qu’il en reste encore beaucoup à découvrir. Les Nord-Coréens n’auraient jamais réellement admis avoir construit ces tunnels (ou ont laissé croire qu’ils s’agissaient de mines de charbon, alors que la roche n’est que du granit); mais ils auraient tout de même avoué avoir creusé le dernier, mais non pas pour envahir le Sud comme c’est supposé dans le film, mais pour faciliter la réunification. On a du mal à y croire…

Le troisième tunnel fait 1,7 kilomètres de long (il est bien sûr maintenant bouché au niveau de la frontière), et se situe à 73 mètres de profondeur ! Avant de descendre, on est avertis qu’il faut éviter d’y aller si on a des problèmes de coeur, de claustrophobie, de dos, de cou, de genoux… On a peur de se retrouver dans un petit tunnel tout étroit à ramper par terre… Pour descendre, il y a un ascenseur, ou un tunnel qui descend. Pour nous, ce sera à pied. La pente est assez douce, et pendant 350 mètres nous descendons avant d’arriver en bas. Le « vrai » tunnel se fait alors nettement plus étroit et bas. Nous sommes d’ailleurs équipés de casques pour éviter de nous cogner ! Il fait aussi très froid la-dedans ! Nous parcourons un bon bout du tunnel jusqu’à l’endroit où il est barré par plusieurs murs. Au milieu, un réservoir d’eau a été installé, et en cas d’une attaque nord-coréenne, le tunnel serait alors inondé du côté nord.

Après être arrivés au bout, nous remontons doucement, et faisons un petit tour dans les installations, prenons quelques photos dans le faux tunnel (il est interdit d’en prendre en bas), et remontons dans le bus.

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Notre prochain arrêt est celui que nous attendons le plus, c’est celui où nous pouvons espérer voir la Corée du Nord. Il s’agit de l’observatoire Dora, pas très loin du tunnel. Il se situe sur le mont Dorasan. Pour y accéder, il faut monter la petite route qui serpente à travers la colline. Notre guide nous indique que la forêt autour est truffée de mines, et que nous circulons donc en ce moment sur la route la plus dangereuse de Corée du Sud… Le genre d’informations qu’on est content d’avoir !

En haut de la colline se trouve un poste d’observation qui donne directement sur la Corée du Nord, avec des jumelles permettant d’en avoir un aperçu. Malheureusement, nous n’avons pas aujourd’hui le magnifique ciel bleu que nous avions pu voir sur des blogs, et le ciel est extrêmement brumeux. Nous arrivons quand même à apercevoir un poste d’observation nord-coréen orné de drapeaux, ainsi qu’au loin Kijong-dong, le « village de la propagande » (nom donné par les Sud-Coréens et les Américains), autrement appelé le « village de la paix ». Tout est une question de point de vue ! Apparemment, ce village était présenté comme abritant 200 familles de fermiers. À force d’observation, les Sud-Coréens ont remarqué qu’en fait personne n’y vivait, car les immeubles ont de fausses fenêtres, et que les lumières s’allumaient et s’éteignaient toujours aux mêmes heures.

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Le plus étrange sur ce poste d’observation est que l’on entend de la musique à fond. Notre guide nous explique que c’est l’armée du Sud qui la diffuse, en réponse à celle envoyée de l’autre côté par celle du Nord. K-pop contre chants propagandistes. Tout est question de provocation, d’un côté comme de l’autre, et on a vraiment le sentiment d’une guerre des nerfs qui se joue entre les deux pays.

Notre dernière visite est la station de train de Dorasan, tout près de l’observatoire. C’est probablement l’une des plus glaçantes car la gare, flambante neuve, est complètement vide. Elle reste bien conservée et propre pour les visites touristiques, mais surtout parce qu’elle symbolise une possible réunification entre les deux pays. Il s’agit de la dernière gare de Corée du sud vers le nord, et donc servait auparavant de point de passage, notamment pour le transport de pièces détachées, assemblées en Corée du Nord dans la zone industrielle de Kaesong, dans un effort de collaboration entre les deux pays (et qui a été définitivement fermée en 2013 quand les relations ont commencé à être trop compliquées). La station de train a été quant à elle complètement fermée en 2008, suite à un accident qui s’est produit en Corée du Nord, quand une touriste Sud-Coréenne a été tuée, après avoir pénétré dans une zone interdite. Les relations se sont alors fortement dégradées, et les Sud-Coréens ont été interdits d’accès au nord. Dans le hall d’entrée, on peut voir les postes d’immigration et les douanes, aujourd’hui complètement fermés. Des morceaux de rails signés par George W. Bush en 2002 sont aussi exposés, avec son discours affiché (il précise bien qu’il ne faut pas laisser « les pays les plus dangereux du monde avec les armes les plus dangereuses du monde », peut-être en référence à l’Irak et à ses « armes de destruction massive » ?). Pour accéder au quai, il faut comme à l’époque, acheter un billet au comptoir. On peut alors voir la direction de la Corée du Nord, au loin (mais à seulement 2 kilomètres). De l’autre côté, un train allemand est exposé, et on peut voir une petite exposition sur le mur de Berlin, peut-être pour montrer qu’il y reste un espoir que la situation se termine un jour. Cela fait maintenant 75 ans que les deux pays sont séparés, et pour l’instant, rien ne semble en annoncer la fin, bien au contraire.

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Nous repartons finalement en bus jusqu’à Séoul. Cette visite a l’intérêt de montrer une situation complètement ancrée dans l’actualité, malgré une impression d’être plongés en plein coeur de 1984. Mais finalement, plutôt que de faire peur, c’est plutôt de la tristesse que nous ressentons, et un vrai sentiment de gâchis pour toutes ces vies, et toutes ces personnes séparées contre leur gré. Nous avons récemment regardé pas mal de reportages de gens qui sont allés en Corée du Nord, ou des reporters qui y sont actuellement et qui postent de nombreuses photos sur Instagram. C’est vraiment intéressant car cela permet de voir que ce pays ne se résume pas qu’à son leader et à ses altercations avec Donald Trump, mais à des millions de personnes qui tentent de vivre le plus normalement possible, avec le cadre qui leur a été imposé. Cela permet aussi d’essayer d’aller un peu plus loin dans la réflexion, de tenter de démêler le plausible de l’impossible, et de ne pas tomber dans une diabolisation extrême qui ne serait que le reflet d’une autre propagande. Pour ceux que ça intéresse, vous pouvez suivre sur Instagram dguttenfelder (National Geographic) ou willripleycnn (CNN), les photos sont incroyables et parfois assez inattendues. Le reportage « Propaganda Game » est également passionnant.

Nous arrivons à Séoul vers 13h et décidons de rentrer à la guest house (nous avons pique-niqué dans le bus) pour nous reposer. Après une bonne sieste, nous partons nous promener dans le quartier, où se trouve le Buchkon Hanok Village, un petit village dans lequel il reste de nombreuses maisons coréennes traditionnelles. Comme souvent, nous sommes entourés de gens en costume qui se mettent en scène dans cet environnement. Les maisons en briques et bois sont très belles, dans les hauteurs, et certaines profitent donc d’une vue imprenable sur Séoul, et sur sa célèbre tour TV, la Seoul Tower.

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Pour finir la journée, et comme nous avons très faim, nous dînons tôt dans un délicieux restaurant de dumplings. Demain, c’est notre dernière journée à Séoul (enfin, nous y retournerons pour prendre l’avion), et nous avons prévu de nous reposer un peu !

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Publié par Marine Lascault

Romain & Marine, 26 et 27 ans. En voyage depuis le 31/01/2017. Actuellement en Indonésie Pays déjà parcourus : Népal, Inde, Sri Lanka, Malaisie, Singapour

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3 commentaires

  1. Reportage très intéressant. Quelle tristesse de voir cette gare moderne complètement déserte. Je crains que le cheval de fer n’est pas prêt de courir de nouveau…

  2. C’est un lieu vraiment glaçant! J’ai dû mal à imaginer qu’il puisse y faire beau. Sinistre…. Heureusement que la fin d’après midi est plus « vivante »! Merci pour les reférences des reportages à consulter!!

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